Ce tome II des Dates incontournables de l’Histoire d’Haïti au 20e siècle se veut un témoignage de la part d’un professeur d’histoire contemporaine, également acteur politique de la période 1987 à 2000. Durant ces treize années, j’ai été un intellectuel engagé, en première ligne lors de nombreux événements d’une importance majeure. À coup sûr, ils ne sont pas tous de même portée, mais tous sont essentiels pour comprendre les rêves, les problèmes, les souffrances — en un mot, le vécu du peuple haïtien à la fin du 20e siècle. En analysant cette période, je me suis rendu compte que certains faits relèvent de ce que Hegel appelle « les ruses de l’Histoire » : des événements inattendus, mais qui finissent par se produire. À cet égard, deux exemples me viennent en tête, propres à la période en question : — l’accession d’Ertha Pascal-Trouillot à la présidence de la République d’Haïti, une femme à la tête de l’État dans un pays marqué par un machisme traditionnel. C’est extraordinaire ! — l’élection de Jean-Bertrand Aristide, considéré comme un curé de gauche au verbe radical, porté à la présidence par un vote massif dans une société où les décideurs traditionnels — haïtiens comme étrangers — sont généralement hostiles à ce type de leader. C’est formidable ! Pourtant, ces deux événements inédits ont leur explication rationnelle. Pour la saisir, il faut impérativement se conformer aux lois qui régissent l’histoire en tant que discipline scientifique. Autrement dit, il convient de prendre en compte le jeu complexe des contradictions, les multiples influences internes et externes, les débats d’idées, le rapport de force entre les acteurs — le tout aboutissant à des situations politiques qui rendent possibles des innovations.